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La guerre, le lit, la table, longtemps l’Histoire a fait de ces trois champs le théâtre de son récit. De là vient la politique, de là vient la stratégie, de là viennent les empires et les civilisations. De ces trois champs, celui qui nous passionne aujourd’hui était le moins exploré. Les historiens ne s’y intéressaient guère. Pour eux, la chronique de l’alimentation n’était pas un sujet prioritaire. On laissait cela aux conteurs, aux fabulistes, aux cuisiniers, aux gastronomes.
Pourtant la bouffe, grande ou petite, a toujours été, à quelque endroit de la planète que l’on pense, une condition de la survie autant qu’un signe de puissance ou de culture. Une condition et un signe qui perdurent à l’heure de la société de l’information, où des centaines de millions de terriens, dont certains équipés de smartphones, sont menacés, en 2023, par le manque de nourriture lié à la guerre et au réchauffement climatique…
En 30 000 ans d’histoire, la place et le rôle de la nourriture n’ont finalement que peu changé. Les empereurs perses n’avaient que rarement besoin de combattre : ils promettaient aux peuples de leurs conquêtes la sécurité alimentaire. Cela faisait mieux tomber les villes que n’importe quel siège.
Dans la Chine impériale, le pouvoir et la place dans la hiérarchie sociale se mesuraient au nombre de plats auquel votre rang vous donnait droit, l’empereur étant, bien sûr, celui auquel on en servait le plus.
Talleyrand parvint presque à faire oublier aux vainqueurs de la France ce pour quoi ils étaient à Vienne lors de la première partie du congrès, avant les Cent‐Jours et Waterloo, en les abrutissant de banquets et de fêtes.
Et la religion, ses autels, ses sacrifices, les mets que l’on offrait aux dieux. L’homme n’est devenu un animal supérieur que parce qu’il a appris à se nourrir, à chasser en groupe, à cultiver, à élever les autres animaux.
Notre but est de mieux comprendre aujourd’hui comment la nourriture – ou son absence – a pu rythmer chaque instant de l’aventure humaine depuis que l’homme existe : les premières assemblées étaient des banquets. Ils resteront jusqu’à la fin du précédent millénaire le lieu de la politique et de l’échange, où se nouaient les alliances, se faisaient et se défaisaient les États, où l’Histoire avait ses quartiers.
Le projet de Gargantua est donc de revisiter ces moments et d’en renouveler la chronique. En donnant la parole à celles et ceux, témoins, historiens, archéologues, ethnologues, démographes, journalistes, critiques, auteurs culinaires, que cette dimension du grand récit a un jour inspirés.
Vincent Lalu
Ils font partie des grandes énigmes que nous propose l’Histoire: combien, parmi les centaines d’aphrodisiaques que le génie humain a semés sur les chemins de sa sexualité, ne sont en fait que d’improbables placebos dont on se demande comment ils sont arrivés là. Les asperges, les huîtres, les cerises et toutes les nourritures bonnes à partager peuvent contribuer à l’ambiance d’une rencontre amoureuse.
Mais que dire des centaines de trucs pas vraiment ragoûtants dont les cultures asiatiques font des magasins, comme les ailerons de requins, les pénis de cerfs, de tigres ou de taureaux, les ongles de coqs, les langues de moineaux, les lézards déshydratés qui n’ont d’autres effets que celui de rassurer le chaland ?
Ce numéro de Gargantua fait le tour des remèdes et des civilisations pour aboutir à cette conclusion que les vrais aphrodisiaques physiologiques sont peu nombreux et parfois dangereux (voire mortels, comme la cantharide). Et que le meilleur de tous les stimulants est l’amour, qui, seul, nourrit vraiment les feux de la passion.
L’intelligence artificielle nous ramène, une fois encore, à l’éternelle question du bon usage du progrès.
D’où l’idée de vous proposer ce cahier de recettes inédit. Où la description des plats reçoit le renfort graphique de l’intelligence artificielle, non, bien sûr, pour tromper le lecteur, mais plus pour exciter son imagination, donner à sa rêverie des dimensions fantasmagoriques que permet le
nouvel outil numérique.
Cet essai accompagne donc une nouvelle section de Gargantua qui est censée vous donner envie de réaliser des recettes de cuisine vieilles pour certaines de 2000 ans. Une expérience à tenter. Avec prudence car
nous ne vous donnons guère d’informations sur les proportions et les temps de cuisson.
L’actualité de Rabelais inspire encore ce deuxième numéro de Gargantua.
Ainsi l’amour, la guerre, les plaisirs, les réjouissances et les complots ne s’éloignent guère du champ des cuisines où commencent les batailles, où la paix finit par triompher.
Le sommaire de ce numéro 2 est bien une confirmation : on vous y résume le mieux possible ces 3000 ans de poison dont Pline disait – avec raison – qu’il était le meilleur ami de l’homme.
En 30 000 ans d’histoire, la place et le rôle de la nourriture n’ont finalement que peu changé.
Les empereurs perses n’avaient que rarement besoin de combattre : ils promettaient aux peuples de leurs conquêtes la sécurité alimen‐ taire. Cela faisait mieux tomber les villes que n’importe quel siège.
Dans la Chine impériale, le pouvoir et la place dans la hiérarchie sociale se mesuraient au nombre de plats auquel votre rang vous donnait droit, l’empereur étant, bien sûr, celui auquel on en servait le plus.
Talleyrand parvint presque à faire oublier aux vainqueurs de la France ce pour quoi ils étaient à Vienne lors de la première partie du congrès, avant les Cent‐Jours et Waterloo, en les abrutissant de banquets et de fêtes
La Brigade tient la cuisine de GARGANTUA.
A chaque numéro, des gourmets, des scientifiques et des historiens viennent leur prêter main forte.
Jean-Charles Blaison a le calembour facile. Mais cet ancien ingénieur underground est d’abord et surtout un vrai gourmand prêt à tout considérer du moment que cela se mange.
Pas étonnant donc qu’il ait été fouiller dans l’œuvre considérable d’Apicius pour en extraire une quinzaine de recettes romaines antiques. À faire chez soi.
Ariane Bouissou est, elle aussi, prête à prendre tous les risques pour satisfaire sa curiosité culinaire. Surtout quand il s’agit de savoir si ce que mangeaient nos ancêtres de la préhistoire était bon.
C’est dans cet esprit que cette ancienne rédactrice en chef à Radio France a participé au dîner « d’époque » mitonné par Emmanuel Perrodin dans la grotte Cosquer à Marseille. (Elle ne ferait pas ça tous les jours.)
Samuel Delziani est passionné par les voyages, la gastronomie et l’histoire. Pas étonnant donc que ce soit la dimension « wagons restaurants » que ce rédacteur en chef de La Vie du Rail préfère dans ses évocations ferroviaires.
Pour Gargantua, il a visité les banquets sauvages qui ont inspiré celui de Game of Thrones. Hémoglobine assurée.
Bruno Fuligni écrit tôt le matin. C’est peut-être pour cette raison d’ailleurs que la gourmandise de ce spécialiste de l’Histoire parlementaire aime à s’exprimer à propos des agapes politiques et des menus historiques.
Anne Jeantet-Leclerc est passionnée de musique, de cuisine et d’histoire. Cette spécialiste du tourisme en train profite donc souvent de ses voyages pour satisfaire ses trois passions.
Elle évoque ici la longue épopée de l’histoire de France racontée dans ses assiettes au travers de l’exposition organisée à la Conciergerie jusqu’au 16 juillet.
Parmi les nombreuses passions de ce grand avocat publiciste, la foi est, bien sûr, celle qui occupe la première place. Au point de l’avoir poussé à devenir le vice-recteur de l’Institut catholique de Paris.
La description et l’analyse qu’il fait des Noces de Cana de Véronèse, ce tableau immense qui, au Louvre, fait face à la Joconde sont ainsi marquées du sceau de ces passions.
Léa Malher assume la face sombre de Gargantua. Quand l’histoire de l’humanité est celle de ses famines et de ses luttes pour la survie.
Cette spécialiste de RSE, membre du comité d’éthique du CESE nous raconte avec Médecins sans frontières les années 1983-1985 en Éthiopie, ces jours terribles qui ont vu la famine et la mort entrer au box-office en même temps que dans la mauvaise conscience de l’Occident.